À l’heure où les taux de vacance du secteur de l’immobilier tertiaire sont historiquement bas dans les capitales européennes et où les loyers ne cessent de monter en flèche, les entreprises sont confrontées à un marché sous-offreur qui les oblige à miser sur la proactivité et la flexibilité dans leurs stratégies immobilières. Secteurs de recherche, engagement sur des baux classiques ou solutions de coworking, hybridation des espaces, sont autant de choix décisifs qui conditionneront leurs performances. En tant qu’interlocuteur privilégié de grands groupes du CAC 40 et des jeunes pousses du French Tech 120, je constate que chaque projet immobilier s’inscrit dans la singularité et le sur mesure, à l’image de cet écosystème diversifié.
Une offre prime qui se raréfie dans les hypercentres européens
Dans la plupart des capitales européennes, le taux de vacance des bureaux est à son niveau le plus bas depuis 2015. Cette baisse généralisée du taux de vacance est encore plus marquée dans les hyper-centres et les quartiers d’affaires. En témoignent les exemples d’Amsterdam (6,2 %), de Berlin (1,5 %), de Dublin (5,1 %) ou encore de Paris (2,2 %). De ce fait, le manque de produits et les taux de vacance exceptionnellement bas engendrent une pression sur les loyers prime. Berlin arrive en tête avec une progression de 10 % en quelques mois, Madrid (+4 %) et Varsovie (+7 %) ne sont pas en reste. Seule Londres fait exception avec une relative stabilité en 2019, mais après une baisse significative les années précédentes. Les conséquences du Brexit associées à un retour plus modéré des loyers qui avaient battu des records depuis une dizaine d’années sont en grande partie responsables de cet état de fait. Face à ce constat, je remarque que la compétition entre les utilisateurs s’intensifie pour dénicher les actifs prime, les espaces de bureaux de qualité, bien situés qui connaissent actuellement une pénurie. La demande est telle que les immeubles neufs ou restructurés sont loués avant même d’être disponibles.
Quelle stratégie adopter dans ce contexte ?
Dans cet univers concurrentiel accru, grands groupes comme start-up sont confrontés à un marché qui les oblige à prendre des décisions ultra rapides. La vitesse de prise de décision devient décisive. Souvent moins d’une semaine pour s’assurer de remporter la mise et de « signer » l’opportunité immobilière qui réunissait le plus de critères positifs. Pour les plus grandes organisations, le changement est brutal. Le temps des processus de sélection d’un immeuble à base de long list, puis medium list avant qu’un comité arbitre une short-list est bien révolu. Il est désormais crucial d’envisager une stratégie immobilière flexible qui puisse évoluer aussi souvent que le contexte le nécessite. Même si les attentes d’une organisation de 100 000 collaborateurs dans le monde sont différentes de celles d’une jeune pousse, les critères géographiques/desserte en transports en commun, budgétaires et de bien-être au travail font toujours partie des fondamentaux, mais la raréfaction des offres peut, dans bien des cas désormais, imposer d’abandonner en route tel ou tel critère.
Le manque de produits et la flambée des loyers dans les quartiers centraux poussent certaines entreprises à faire le choix de la périphérie, pourvu qu’elle soit bien desservie. C’est le cas de la licorne Doctolib qui vient d’installer son « Doctocampus » à Levallois-Perret. Partant du principe que le coût de sa stratégie immobilière ne doit pas être un frein à son développement, cet acteur de la French Tech a opté pour un secteur qui propose des loyers plus mesurés, des immeubles de qualité et un accès au métro, le tout aux portes de Paris.
D’autres acteurs préfèrent miser sur des temps courts et flexibles en optant par exemple pour le coworking. De jeunes entreprises amenées à se développer privilégient ce modèle qui leur permet d’optimiser leurs coûts au fur et à mesure de l’évolution de leur croissance. Avant de s’établir dernièrement dans le QCA de Paris, la start-up WeMaintain, spécialisée dans la maintenance d’ascenseurs avec une approche basée sur la technologie au service du technicien, s’est d’abord intéressée au coworking pour des raisons de flexibilité. Son ascension fulgurante (WeMaintain a levé 9 millions d’euros en 14 mois) l’a conduite ensuite à changer quatre fois de locaux en l’espace de deux ans. Une telle rotation n’est pas compatible avec un bail traditionnel 3-6-9.
Parmi les autres pratiques que l’on voit émerger au sein des entreprises, la sous-location offre l’opportunité de rentabiliser les espaces inoccupés. Alors que le nomadisme s’impose comme une tendance pérenne ces dernières années et que le taux d’occupation des postes diminue, de plus en plus de groupes n’hésitent plus à maximiser leurs espaces vacants en les partageant avec des tiers.
La location de bureaux annexes a également le vent en poupe en ce moment pour les entreprises en développement qui ont besoin de m² supplémentaires. Pour rentabiliser les coûts, certaines entreprises n’hésitent pas à multiplier les implantations plutôt que d’emménager dans un nouveau siège. Mais ce choix de scénario implique des enjeux de ressources humaines et de management d’équipes basées sur différents sites.
Face à la pénurie des offres prime et à l’envolée des loyers, les entreprises repensent leur stratégie immobilière. La tendance est désormais à l’anticipation, à la flexibilité et l’agilité. Et avec la politique de taux bas qui s’installe durablement, les prix ne devraient pas baisser au cours des prochains mois. En tant que professionnels de l’immobilier, il nous incombe d’être suffisamment à l’écoute de nos clients pour répondre au plus près de leurs besoins et attentes et de leur proposer les options les mieux adaptées.
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