Responsabilité et engagement pour un actif attractif
La transition verte est aujourd’hui cruciale et répond à des enjeux économiques, sociétaux et environnementaux majeurs. Le secteur de l’immobilier ne fait pas exception à la règle : premier émetteur de CO2 avec 37% des émissions mondiales[1], le secteur est aujourd’hui soumis à de nombreuses et contraignantes normes réglementaires, conséquences directes de la nouvelle norme environnementale dite RE2020. Promoteurs, Property Managers, Investisseurs et Utilisateurs s’emparent désormais du sujet et visent l’optimisation de leurs performances environnementales. Amandine Grochowiak, Directrice du Développement Durable France chez BNP Paribas Real Estate Property Management nous parle de son métier devenu essentiel pour valoriser un actif et fidéliser des locataires.
- Dans un premier temps, pourriez-vous décrire votre parcours et votre travail au quotidien ?
Après avoir obtenu un diplôme d’ingénieure généraliste et un Mastère efficacité énergétique et environnementale du bâtiment, j’ai eu la chance d’intégrer un Bureau d’étude spécialisé en énergie du bâtiment. J’ai ensuite rejoint une équipe de consulting spécialisée en conseil en exploitation immobilière digitale et durable. C’est armée d’une double expertise, AMO en exploitation et optimisation énergétique, que j’ai intégré les équipes du Property Management de BNP Paribas Real Estate il y a plus de 6 ans en tant que cheffe de projets environnementaux.
Désormais directrice du développement durable pour nos activités de property management en France, je manage 11 référents ESG, pleinement intégrés dans nos équipes de gestion. En duo avec les Property Manager sur les actifs, ils apportent leur expertise sur les problématiques environnementales et le bien-être utilisateur. au travers de cette organisation unique sur le marché, Nous travaillons sur trois piliers : l’énergie (optimisation énergétique dont l’achat d’énergie et la mise en place de contrat de performance énergétique avec les prestataires multi-techniques), les certifications environnementales et le bien-être des utilisateurs, ainsi que le sujet des trajectoires net zéro carbone.
- Les régulations gouvernementales et européennes influencent-elles le rythme du développement de vos roadmaps ?
Depuis le 1er mars 2021, la réglementation Finance Responsable et Durable (SFDR) soumet tous les investisseurs à une déclaration de performance extra-financière (DPEF). C’est-à-dire qu’ils sont soumis à détailler l’ensemble des implications sociales, environnementales et sociétales de leur performance et de leurs activités, ainsi que leurs modes de gouvernance. Nous sommes là pour les conseiller et les guider dans la méthodologie et la démarche à adopter. Nous constatons que les demandes des investisseurs sont plus importantes aujourd’hui qu’il y a 5 ans, et proposons désormais des plans d’action long terme, à horizon 2050.
- Quelles évolutions avez-vous vous constaté ces 10 dernières années en matière de critères ESG et de politiques RSE ? Comment le Property Manager s’est-il adapté pour répondre du mieux possible à ces nouvelles attentes politiques et sociétales ?
Les lois liées à la Transition énergétique évoluent depuis plusieurs années, il y a des réglementations thermiques depuis 1973 ! Le Property Management est pro-actif dans ces évolutions, et chez BNP Paribas Real Estate Property Management nous avons toujours été force de proposition tant par l’application de notre politique RSE groupe que de par la mise en œuvre des certifications liées à la performance d’un actif, ou encore la sélection des prestataires de services des actifs jusqu’à la réalisation des travaux d’optimisation énergétique chez les locataires.
Dès 2008/2009, la Loi Grenelle fixait l’objectif de diminuer les consommations énergétiques de 38%, suivie de la Loi Grennelle II en 2010 qui obligeait la rénovation, l’obligation d’insérer dans les baux une annexe environnementale, ou encore la Loi Ddadue en 2020 qui a rendu obligatoire l’audit énergétique… Et depuis 2021, la SFDR a pour objectif d’apporter plus de transparence en matière de finance durable. Elle nous permet d’inclure les enjeux sociaux, environnementaux et de gouvernance dans la gestion de nos actifs. Pour répondre à ces nouveaux objectifs, nous mettons en place des contrats spécifiques avec des prestataires choisis pour leur professionnalisme. Grâce à notre veille réglementaire quotidienne et une connaissance de tous ces textes en vigueur, nous répondons aux exigences de nos investisseurs et de nos bailleurs par la mise en poste de référents « green » maitrisant l’ensemble des référentiels de certifications, des optimisations énergétiques et des items liés aux bien être des utilisateurs dans les locaux.
- Quels types d’actions concrètes et d’outils peuvent naître de vos recommandations ?
En analysant les données à travers une grille de notation ESG répondant aux exigences de la SFDR et en réalisant un état des lieux sur chaque actif, nous identifions des leviers d’action forts en vue de l’amélioration des performances ESG mais aussi des performances énergétiques de l’immeuble. Nous proposons à nos clients des scénarii de réduction de leurs consommations énergétiques, afin de tendre vers le « Zero Carbone » et les conseillons dans l’obtention de certifications environnementales comme BREEAM in Use, HQE Exploitation, mais aussi de nouvelles certifications tournées vers le bien-être des occupants comme Well ou Wire Score. Chaque actif est étudié au regard de la stratégie visée par les propriétaires et de leur potentiel d’optimisation.
Nous les aiguillons dans leur feuille de route, nous pouvons aussi leur donner des préconisations sur des services afin de valoriser leurs actifs. Par exemple, dans le cas d’un immeuble résidentiel premium, nous pouvons proposer des certifications bien-être des utilisateurs, des améliorations du hall d’accueil ou encore de créer un service de gardiennage ou de mise à disposition d’une conciergerie digitale. Pour un immeuble de bureaux, un plan de mobilité ou la mise en place de bornes électriques de rechargement peuvent faire partie de nos recommandations afin de favoriser les nouveaux modes de transport alternatifs. Tous ces items répondent favorablement aux enjeux ESG !
- Quels outils vous permettent de mesurer et d’optimiser l’impact et les performances environnementales des actifs ?
Nous nous adaptons à tous types d’outils qui récupèrent de la data. Tous les investisseurs ou les bailleurs n’ayant pas les mêmes logiciels, nous avons une plateforme commune qui nous permet de centraliser et d’analyser les données des bâtiments. C’est grâce à la data que nous identifions les pistes d’amélioration et d’évolution d’un actif immobilier. Nous ne pourrions pas nous en passer puisqu’elle est le socle de notre travail : l’état des lieux d’un bâtiment se fait à travers la collecte, de plus en plus fine, de toutes ses données. L’audit énergétique est fortement préconisé et est décisif : la signature énergétique est un facteur de valorisation de tout actif immobilier et un axe d’économie potentiel. Nous en tirons des informations qui sont le point de départ du plan d’action, ensuite elles nous donnent à voir où nous nous plaçons par rapport aux objectifs fixés. La synthèse des données récoltées est soumise à l’investisseur afin qu’il réalise notamment son reporting extra-financier. Et nous allons plus loin dans l’accompagnement, puisque nous le conseillons dans la définition de sa stratégie, c’est cette force d’analyse qui fait notre valeur ajoutée.
L’autre outil primordial sur le terrain est la communication. Nous organisons un comité environnemental, annuel ou semestriel selon l’actif et les besoins, durant lequel nous discutons avec les locataires, les bailleurs investisseurs, et les exploitants. Nous abordons des sujets tels que l’énergie, les déchets, l’eau, la biodiversité ou encore la faune et la flore. C’est un moment crucial puisque nous identifions des besoins et adaptons ensuite la gestion de l’immeuble en fonction. L’implication des locataires est essentielle est primordial. Pour les faire adhérer et les sensibiliser nous organisons des journées de formation. Nous avons réussi à faire adhérer les utilisateurs de la tour Cœur Défense à des challenges énergétiques inter-étage et inter locataires, le concours « CUBE ».
- En quoi la performance environnementale d’un bâtiment est-elle intimement liée à la performance d’un actif immobilier ?
Lorsqu’un investisseur décide de vendre un actif, il met en place un plan d’action afin de le valoriser à travers son plan financier de vente. Si le bâtiment répond aux normes standards, le futur acquéreur n’aura pas de travaux à faire et le prix de vente de l’actif sera plus haut. Aujourd’hui, les critères ESG font partie intégrante des stratégies immobilières et des comités d’investissements : ils sont devenus un standard pour les investisseurs comme les sujets RSE pour les locataires. Finalement, la performance environnementale est déjà en passe d’être la nouvelle norme : en ayant des conséquences sur les budgets et notamment sur les charges liées aux énergies mais aussi sur le bien-être des occupants, elle est un atout majeur pour toutes les parties prenantes d’un immeuble.
- Comment construire une feuille de route ESG pertinente sur son portefeuille d’actifs ?
Un investisseur peut en effet souhaiter avoir un cohérence ESG sur l’ensemble de son parc, et même dans plusieurs pays à la fois. Grâce à une réflexion globale et pragmatique, nous établissons ou confortons la stratégie de nos clients et de leur fonds, homogénéisons certains plans d’actions sur les actifs et nous les orientons sur la mise en place d’actions en leur expliquant les conséquences financières : l’investissement nécessaire et sa pertinence, le retour sur investissement, le degré de priorisation par rapport aux actions déjà mises en œuvres sur son actif avec les délais de mise en œuvre. A l’issue de l’état des lieux et l’évaluation initiale, nous élaborons au travers de notre mandat de gestion, les plans pluriannuels de travaux et accompagnons la prise de décisions de nos investisseurs. La partie Gouvernance de l’ESG est caractérisée par les actions qui sont mises en place par l’investisseur, ce qui le pousse à raisonner sur une échelle globale et à nous demander de plus en plus d’intervenir à l’échelle de son portefeuille et de déployer des actions communes à plusieurs immeubles. Nous adaptons donc à l’issue de ces décisions nos contrats d’exploitation et missions de conseil afin de répondre à ces exigences ESG.
[1] Global Alliance for Buildings and Construction, Agence Internationale de l’énergie