Dans un contexte économique incertain, marqué par une inflation élevée et une hausse des taux impactant l’immobilier dans son ensemble, les volumes d’investissements en immobilier commercial en Europe ont diminué dans toutes les classes d’actifs. C’est le cas dans la très large majorité des pays entre le T1 2022 et le T1 2023.

Les chiffres sont éloquents :  - 29 % pour l’immobilier d’entreprise (219 milliards d’euros en glissement annuel), - 41 % pour les bureaux (74 milliards d’euros) et - 6 % pour le commerce (39 milliards d’euros) [1]. Italie (- 90 %), Pays-Bas (- 73 %), Espagne (- 30 %), Allemagne (- 23 %), Royaume-Uni (- 19 %), France (- 9 %)… seules l’Irlande (+ 220 %) et la Belgique (+ 220 %) ont vu leur volume d’investissement en commerce évoluer positivement en Europe [2].

Pour le commerce de détail, selon la localisation, le type de commerce ou le niveau de gamme, tous les voyants restent bien orientés. Le retour du tourisme à son niveau d’avant crise sanitaire, mais aussi les grands évènements internationaux qui se dérouleront en France, tels que la Coupe du Monde de Rugby 2023 et les Jeux Olympiques 2024, constituent une manne financière considérable.

Retour sur un marché de l’immobilier du commerce qui mute et s’adapte non seulement aux défis économiques, mais aussi, et c’est essentiel, aux nouvelles exigences des consommateurs.

Marché utilisateur : des indicateurs stables voire en hausse

Valeurs locatives et taux de vacance

 

Le marché utilisateur révèle de nombreuses disparités géographiques, aussi bien à l’échelle nationale que locale. Les valeurs locatives faciales « prime » dans les métropoles régionales sont globalement stables, voire en hausse entre le T1 2023 et le T2 2023. Bordeaux (2 400 €/m² ZA), Toulouse (1 400 €/m² ZA) ou Lille (2 000 €/m² ZA) sont stables par rapport au T1 2023. Nice (2 500 €/m² ZA) et Lyon (2 900 €/m² ZA) ont vu leurs valeurs locatives faciales prime augmenter, contrairement à Marseille (2 400 €/m² ZA) par exemple.

A l’échelle des rues ou des grandes places parisiennes, l’évolution des valeurs locatives faciales prime entre le T1 2023 et le T2 2023 se veut elle aussi globalement stables. Les Champs-Elysées (16 000 €/m² ZA), l’avenue Montaigne (14 000 €/m² ZA), l’avenue Rivoli (3 000 €/m² ZA) ou Saint-Germain-des-Prés (4 500 €/m² ZA) témoignent d’une hausse. Le faubourg Saint-Honoré (14 000 €/m² ZA), les quartiers de l’Opéra (2 200 €/m² ZA) et de Saint-Michel (2 300 €/m² ZA) affichent une baisse. Les autres rues, places et quartiers ont des valeurs locatives faciales prime stables.

Quant au taux de vacance entre le T1 2023 et le T2 2023 en France, nous pouvons souligner une baisse généralisée depuis le pic atteint lors de la crise sanitaire. Encore une fois, des tendances disparates se dégagent à Paris comme en région, selon les artères (phénomènes de micro-marchés selon les tronçons et localisations).

Les commerces, un marché en pleine mutation

Un renversement des tendances

 

Si les commerces de milieu de gamme constituaient jusqu’alors la majorité des développements, ce sont désormais le luxe/premium et le bazar/discount qui se taillent la part du lion. Mass-market saturé, croissance du e-commerce (20 % environ du marché de l’habillement), inflation et perte de pouvoir d’achat des ménages, hausse des charges, concurrence de la fast-fashion… constituent en grande partie les raisons qui expliquent la perte de vitesse des commerces de milieu de gamme du prêt-à-porter.

De leur côté, les commerces de luxe sont moins impactés par la conjoncture, et continuent leur course au meilleur emplacement, à Paris. Une course à l’acquisition est lancée sur les Champs Elysées par le Groupe LVMH ou sur l’avenue Montaigne, et sur la rue Saint Honoré pour le groupe Kering.

Les enseignes discount, quant à elles, ont une croissance impressionnante depuis quelques années, tant en périphérie des villes qu’en centre-ville. Action, Aldi, B&M… ont des formats qui s’adaptent à presque tous les sous-jacents du commerce.

Enfin, plusieurs secteurs de vente connaissent un essor fulgurant. C’est notamment le cas des enseignes de sport/sportswear, de mobilier et décoration d’intérieur, ou encore des mobilités douces.

Les retail parks, un format résilient, attractif et « lisible » pour les investisseurs

Un format plébiscité par les consommateurs

 

Les retail parks – traduction anglaise des parc d’activités commerciales – ont le vent en poupe depuis plusieurs années. Et pour cause, ils séduisent autant les enseignes que les consommateurs.

Les faibles niveaux de loyers, ainsi que les charges immobilières et locatives contenues (maintenance moins coûteuse, meilleure isolation, moins de dépenses pour la publicité, etc.) séduisent de nombreuses enseignes qui viennent s’implanter ou y demeurent.

Côté consommateur, les surfaces de vente à taille humaine, l’accessibilité aisée, la multiplicité des enseignes ou encore les prix maitrisés font des retail parks des concepts adaptés aux modes de vie des ménages français, notamment en périphérie des villes.

Un marché global toujours très dynamique en 2023

Un marché dominé par les privés et les SCPI

 

Le secteur du retail a connu une année 2022 exceptionnelle, notamment marquée par le boom des investissements en périphérie (2,2 milliards € investis) au détriment des centres-villes malgré un volume important dû à plusieurs jumbo deals de convenance (2 milliards € investis).

Si le T1 2023 marque une baisse de 23 % des investissements dans ce secteur par rapport au T1 2022, le volume des investissements dans le commerce demeure largement supérieur à la moyenne quinquennale (16 %) avec 29 % [1] pour s’afficher à 1,6 milliard € investis au 1er juin 2023. A 5 mois, ce sont désormais les commerces de centre-ville qui dominent le marché avec 35 % des investissements, 33 % pour les centres commerciaux et 31 % pour les commerces de périphérie. A noter que 3 % des transactions représentent 49 % des volumes d’investissements dans le retail. En effet, quelques jumbo deals ont eu lieu, portant ce marché en trompe-l’œil où les ventes utilisateurs effectuées par les grands groupes du luxe pèsent fortement dans le total.

Enfin, les privés/utilisateurs (37 %) et les SCPI (28 %, une spécificité française) sont responsables de la majorité des transactions dans le retail sur les 5 premiers mois de 2023 pour, respectivement, 20 % et 16 % des montants investis. Les foncières [2] représentent quant à elles 40 % du volume d’investissement, pour seulement 10 % des transactions.

Les taux prime, mis sous pression par la remontée rapide du taux sans risque, s’affichent désormais à 4 % pour les pieds d’immeubles, 5 % pour le marché de niche des centres commerciaux et 5,5 % pour les retail parks.

Malgré un contexte incertain et une forme d’attentisme, le secteur du commerce demeure dynamique et compétitif sur le début d’année 2023. La France continue d’être un pays attractif pour le retail compte tenu des mesures mises en place pour contenir l’inflation, des évènements sportifs majeurs à venir, de la densité commerciale raisonnable présente dans le pays, des lois limitant l’étalement urbain ou encore des grosses transactions attendues. Ces éléments permettent à BNP Paribas Real Estate d’anticiper un volume de 3,75 milliards € investis en commerce sur l’année 2023 – un montant légèrement inférieur à la moyenne décennale.

Sources :

[1] - BNP Paribas Real Estate
[2] - Idem
[3] - BNP Paribas Real Estate
[4] - Foncières autres que SCPI, OPCI et SIIC

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