Et si encourager, favoriser et réorienter les flux de capitaux et les investissements financiers européens, privés comme publics, vers une économie plus durable, sociale et pérenne permettait de soutenir le développement durable, de prévenir les dommages environnementaux, et de lutter contre le dérèglement climatique ?

Convaincue de cette entreprise aussi ambitieuse que nécessaire, la Commission européenne a communiqué le 8 mars 2018 son « plan d’action pour financer la croissance durable ». Taxonomie européenne, développement d’un standard d’obligations vertes (EU Green Bond Standard), mise en place d’indices de marché alignés avec l’Accord de Paris de 2015, règlement CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive)… ne sont que quelques exemples d’un ensemble de réglementations interdépendantes, publiées entre 2018 et 2022 par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne (UE), qui découlent de leur plan d’action, et plus largement du pacte vert pour l’Europe.

Un élément clé de cette stratégie européenne est la « Réglementation (UE) 2019/2088 du 27 novembre 2019 sur la publication d’informations en matière de durabilité » dans le secteur des services financiers, dite réglementation SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation), entrée en vigueur le 10 mars 2021. De quoi s’agit-il ?

Quels sont les objectifs du règlement SFDR ?

Investissement durable, transparence et communication

 

L’objectif principal de la réglementation SFDR est d’orienter les flux de capitaux vers des activités économiques durables, et de définir les exigences relatives aux produits d’investissement présentés comme durables. Pour ce faire, cette législation établit les critères permettant de déterminer si une activité économique relève d’un investissement durable sur le plan environnemental.

En effet, le règlement SFDR, imposé au niveau de l’UE, vise à harmoniser les obligations de transparence et à communiquer aux investisseurs des informations sur les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) tant au niveau des produits financiers que des entreprises. Grâce à ce dispositif, les investisseurs seront plus à même de comparer les démarches et stratégies des différents gérants d’actifs européens vis-à-vis des principaux enjeux en matière de durabilité, comme le changement climatique.

À qui s’applique le règlement SFDR ?

Quels sont les types de produits et de services concernés ?

 

Le champ d’application du règlement SFDR est relativement large, puisqu’il s’applique à tous les acteurs des marchés financiers et aux conseillers financiers établis dans l’UE, ainsi qu’aux gestionnaires ou conseillers en investissement établis en dehors de l’UE, qui commercialisent (ou ont l’intention de commercialiser) leurs produits à des clients de l’UE en vertu de l’article 42 [1] de la directive sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs (directive AIFM de l’UE) [2].

Pour ce qui est des produits, les obligations d’information s’appliquent aux OPCVM (Organisme de Placement Collectif en Valeurs Mobilières), aux fonds alternatifs, aux portefeuilles dédiés et aux mandats de gestion déléguée, ainsi qu’aux conseils financiers (proposés au sein de l’UE ou par une entreprise d’investissement de l’UE).

Quelle est la classification des produits financiers ?

Articles 6, 8 et 9

 

Le règlement SFDR prévoit trois catégories de produits/fonds différentes, désignées par le nom de l’article de la réglementation SFDR qui s’applique dans chaque cas :

  • Les produits relevant de « l’article 6 » intègrent les considérations relatives aux risques inhérents aux critères ESG dans le processus de décision d’investissement, ou expliquent pourquoi le risque de durabilité n’est pas pertinent, mais ne satisfont pas aux critères supplémentaires applicables aux stratégies relevant de l’article 8 ou de l’article 9.
  • Les produits relevant de « l’article 8 » promeuvent des caractéristiques sociales ou environnementales en tenant compte des critères ESG dans le cadre du processus d’investissement, mais ne s’articulent pas autour d’un objectif d’investissement durable.
  • Les produits relevant de « l’article 9 » ont un objectif d’investissement durable et cherchent par conséquent à obtenir des résultats spécifiques en matière de durabilité, qu’ils soient environnementaux ou sociaux, parallèlement à leurs perspectives de performance financière. Ils visent à réduire, dans la mesure du possible, toute incidence négative sur le plan environnemental, social et salarial, tout en intégrant le respect des droits de l’homme et la lutte contre la corruption dans les décisions d’investissement.

 

Avec la règlementation SFDR, les gérants d’actifs devront désormais indiquer quel pourcentage de leurs actifs sous gestion relève des articles 6, 8 ou 9.

Homogénéisation des informations sur les produits financiers

Incidences négatives et Risques en matière de durabilité

 

Pour atteindre les objectifs du règlement SFDR, à savoir développer la finance durable en renforçant la transparence et en établissant des normes, les sociétés de gestion d’actifs et les conseillers en investissement doivent communiquer, entre autres, comment ils prennent en compte deux facteurs clés : les Principales incidences négatives et les Risques en matière de durabilité.

Les Principales incidences négatives, comme définis par en préambule du règlement 2019/2088 (SFDR), désignent « les incidences des décisions d’investissement et des conseils en investissement qui entraînent des effets négatifs sur les facteurs de durabilité ». Au titre de la réglementation SFDR, les questions environnementales, sociales et de gouvernance, le respect des droits de l’homme, la lutte contre la corruption et les actes de corruption définissent les facteurs de durabilité. Il s’agit donc des effets négatifs susceptibles de résulter d’une décision d’investissement.

Concernant les Risques en matière de durabilité, ils sont définis par l’article 2.22 du règlement 2019/2088 (SFDR) comme « un événement ou une situation dans le domaine environnemental, social ou de la gouvernance qui, s’il survient, pourrait avoir une incidence négative importante, réelle ou potentielle, sur la valeur de l’investissement ».

Enfin, le règlement SFDR impose de rendre transparentes les politiques de rémunération tenant compte de l’intégration des risques liés au développement durable.

Quels sont les différents niveaux d’information à communiquer ?

Informations selon la classification du produit financier

 

Au-delà des informations spécifiques à communiquer sur la prise en compte des Principales incidences négatives et des Risques en matière de durabilité, le règlement SFDR prévoit actuellement plusieurs niveaux distincts d’information concernant l’investissement durable et les considérations ESG applicables aux produits d’investissement.

Tous les produits/fonds devront apporter des précisions au regard de la règlementation. Même les stratégies ne revendiquant aucune intégration des critères ESG devront indiquer aux clients la façon dont les risques en matière de durabilité sont intégrés dans le processus de décision, et leur impact éventuel sur les résultats financiers (Article 6).

D’un autre côté, les produits/fonds classés Articles 8 ou Article 9 du règlement SFDR doivent répondre à des exigences plus détaillées. Pour ces cas, les sociétés de gestion d’actifs et les conseillers en investissement doivent communiquer les informations suivantes :

  • La manière dont la stratégie d’investissement prend en compte les caractéristiques ESG ou l’objectif durable, y compris en ce qui concerne l’allocation d’actifs prévue.
  • Les détails concernant l’objectif ou les objectifs ESG et la répartition des différentes catégories d’investissement.
  • Les détails concernant la façon dont les incidences négatives sont quantifiées, évaluées et gérées, et dont les positions susceptibles de nuire aux objectifs en matière de durabilité sont éliminées.
  • La liste des indicateurs de durabilité pertinents.
  • Les informations concernant la compatibilité des instruments dérivés utilisés avec les objectifs ESG du produit.


À noter toutefois que certaines obligations supplémentaires, notamment de publication et de communication d’informations, pourraient voir le jour dès le 1er janvier 2023. Sous réserve que les normes techniques réglementaires correspondantes du règlement SFDR soient transposées dans le droit communautaire, à partir du 1er janvier 2023, des éléments du règlement européen Taxonomie seront intégrés dans les obligations d’information définies par le règlement SFDR. Ce qui impactera les produits financiers relevant de l’article 8 ou de l’article 9.

Le règlement SFDR constitue une évolution positive pour le verdissement de l’économie et le développement de l’investissement durable ESG dans l’UE. A mesure que les investisseurs manifestent un intérêt de plus en plus grand pour l’investissement durable et les considérations ESG, le règlement permet aux investisseurs de s’appuyer sur une transparence accrue, mais aussi des comparaisons et des conseils clairs en matière d’investissements durables et ESG, encourageant les sociétés de gestion d’actifs et les conseillers en investissement à orienter les flux de capitaux vers les produits d’investissement contribuant à une économie plus durable.

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