La crise sanitaire a soulevé de nombreuses questions organisationnelles. Elle pose également la question de la centralité du siège social et de son symbolisme. Centre décisionnel et gravitationnel, la crise sanitaire liée au COVID-19 a pu montrer des façons de travailler autrement, grâce à la mobilisation notamment des ressources informatiques et des outils numériques. Quelles sont les conséquences sociologiques d’un tel phénomène ? Peut-on articuler un travail présentiel avec une pratique plus banalisée du télétravail dans les mois et les années à venir ? Comment repenser la structure organisationnelle de l’entreprise en maintenant bien-être, confiance et productivité au travail ?
La crise sanitaire comme accélérateur des nouvelles pratiques
Le télétravail connaît un succès croissant et mitigé depuis ces dernières années. Si on lui prêtre de nombreuses vertus, il a pu laisser perplexe certains managers et salariés, soucieux de préserver un contact quotidien avec leurs équipes. Cependant, comme toute nouvelle pratique, son acceptation a dû se faire progressivement et à mesure que les outils technologiques évoluaient. La crise sanitaire est venue bousculer nos habitudes, sans possible transition et il a fallu réagir dans l’urgence. L’heure n’était plus à la réflexion, mais à une mise en pratique immédiate, et ce à grande échelle.
Les conditions inédites du confinement ont contraint les entreprises à s'adapter et à déployer des moyens conséquents pour surmonter les difficultés lors des premières semaines. Je pense que cet épisode n’a fait que confirmer une propension à la dématérialisation de nos postes de travail. Bien entendu, on ne saurait parler aujourd’hui de télétravail apaisé et organisé, mais plutôt de téléconfinement. Nous avons été contraints de rester chez nous, parfois dans de petites surfaces ou avec des enfants à charge et pas nécessairement avec les outils ou la surface idéale pour travailler. Si toutes les entreprises n’étaient pas adaptées, il est clair que les logements ne l’étaient pas non plus. Cette expérience ne saurait donc être représentative. Toutefois, nous avons pu poursuivre notre activité, maintenir nos réunions et trouver un rythme malgré tout. Nous sommes arrivés à un point de basculement qui a prouvé la résilience d’un système.
C’est à partir du 11 mai, dans le cadre d’un déconfinement progressif et pour certains profils éligibles, que nous serons à même d’expérimenter réellement le télétravail à grande échelle et dans des conditions empiriques. Dans le cadre du respect des mesures de distanciation sociale, certains retourneront au bureau et d’autres resteront chez eux. La perception du bureau, du logement, des transports et du siège social en seront impactés ainsi que leurs usages.
Vers une généralisation du travail à distance après le confinement ?
Si les grandes entreprises disposaient déjà des ressources nécessaires, les plus petites ont dû s’adapter et trouver des solutions malgré tout. Aujourd’hui les installations sont là ou en cours d’acquisition. Un cap a été franchi. La digitalisation des outils de travail dans un tel contexte a permis une formation express pour celles et ceux qui n’étaient pas forcément à l’aise avec ce type de pratique. Je pense que toutes les conditions sont désormais réunies et que cette tendance va se poursuivre et s’enraciner.
Les crises récentes ont montré la nécessité de pouvoir travailler de chez soi, d’anticiper certaines problématiques liées au climat, aux mouvements sociaux ou aux problèmes de transport. Le confort inhérent au home office n’est également plus à prouver. On pense au temps en moins passé dans les transports qui apporte un réel confort et un gain de temps considérable. Les entreprises vont devoir réinventer leurs espaces de bureau et de nouvelles formes de communication devraient s’inscrire durablement. Les managers vont devoir également gérer leurs équipes à distance, aménager de nouveaux modes d’organisation… tout cela apporte de nombreuses opportunités.
Tiers-Lieux et hybridation des espaces
Avant la crise sanitaire, la stratégie était de maximiser les surfaces et d’inciter à la collaboration de façon flexible. L’immeuble d’entreprise s’apparentait alors comme le centre gravitationnel où convergeaient les individus, créant ainsi des flux de passage importants avec toutes les conséquences que nous connaissons. Le Flex Office est alors apparu comme la réponse idéale et a commencé à estomper la notion de bureau individualisé. La question de l’interchangeabilité des espaces de travail va se reposer de la même manière que l’optimisation des open space déjà densément occupés.
Va-t-on revenir à des espaces dédiés et un aménagement plus traditionnel ? Bien au contraire ! Si nous travaillons deux à trois jours par semaine depuis chez nous, nous verrons fleurir de nouveaux espaces hybrides, qu’il reste encore à inventer. Il ne s’agira ni d’espaces résidentiels, ni de bureaux, ni d’hôtels… mais un peu tout cela à la fois, des tiers-lieux en somme. Les espaces de coworking en partenariat avec les sièges sociaux devront eux aussi s’adapter, ils auront un rôle important à jouer et devront proposer de nouvelles formes en phase avec les enjeux sanitaires et les nouveaux besoins des salariés.
Les nouvelles fonctions de l’immeuble d’entreprise
Le télétravail est une évidence, mais à condition qu'il soit encadré et structuré. C’est ici que l'immeuble d'entreprise joue un rôle majeur et incontournable. Il reste un lieu de sociabilisation, de formation, de repères, d’identité et offre une augmentation technologique considérable. L’immeuble de bureau - et d’autant plus le siège social - est en quelque sorte la vitrine de l’entreprise, c’est un lieu où se croisent les collaborateurs, les prestataires, les clients, les alternants, les stagiaires, les nouvelles recrues… Il est un lieu d’attractivité pour les talents et les investisseurs ; un carrefour d’opportunités. Cela ne veut pas dire que les bureaux offriront moins de mètres carrés, mais, si j’ose dire, « mieux de mètres carrés ».
Il faudra profiter de ces espaces renouvelés pour une démarche servicielle plus qualitative et inspirante. Rien ne remplace le contact, le non-verbal, tous ces comportements spontanés qui permettent d’obtenir une information, de relancer un collègue, d’organiser une courte réunion improvisée, de répondre à une problématique et d’avancer concrètement sur un dossier. C'est ce qu’il convient d’appeler la communication informelle. Le travail c’est aussi un lieu d’échange, de ressenti et d’expérience que seul l’immeuble d’entreprise pourra continuer d’offrir.
Tribune signée
Sylvain Hasse, Head of Corporate Services BNP Paribas Real Estate
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